Le journal quotidien - non hétérophobe - de
Silvano Mangana (nom de plume Louis Arjaillès). Maison de confiance depuis 2007.

"La gravité est le plaisir des sots"
(Alexandre Vialatte)


lundi 7 septembre 2015

Rome : une ville sans cinémas est une ville qui s'endort ?

Les jeunes de "Cinema America Occupato" ont entrepris de redonner tout son lustre à cette salle.



" Rome s'est endormie dans la beauté de son passé, et les princes charmants occasionnels que furent les cinéastes Fellini, Pasolini, Rosselini, etc., n'ont eu l'air de la réveiller que le temps d'un lumineux baiser."





C'est la conclusion d'un commentaire de Pierre, lecteur impliqué, au sujet du petit film inséré ici samedi dernier. (Le billet et le commentaire intégral ici : clic)
Ces mots n'ont eu de cesse de me tarauder, et je me suis souvenu de ma stupeur, arpentant la Via Veneto, de n'y croiser que les fantômes du passé cinématographique de cette artère fréquentée autrefois par les gloires de l'histoire du 7è Art et les premiers paparazzi.
Photo Davide Franceschini-Macine
Parcourant plus d'une fois la Via Nazionale, j'y soupirai devant la façade muette du Cinema Quirinale, façade rénovée depuis, certes, mais n'abritant qu'un espace de réunion pour cadres de banque.
La carte des cinémas romains fermés pour toujours, en ruines, ou transformés en supérette, est impressionnante. Vous me rétorquerez qu'il en est de même à Paris et partout en France. Oui, mais le soutien à la création cinématographique étant ce qu'il est, chez nous, ont poussé, ici, des multiplexes qui ont permis de compenser quelque peu ces fermetures, en adéquation avec la fréquentation, importante, dans l'hexagone.

Le Cinema America dans le Trastevere avant la faillite
Survenant sur le tard, mais très efficacement, la réaction d' Italiens se disant orphelins de leur cinéma et œuvrant avec obstination pour stopper l'hécatombe (les tout-jeunes membres du collectif "Cinema America Occupato" sur lesquels je prépare un billet conséquent ou les animateurs du site "Macine" entre autres) représente un véritable espoir ; ces jeunes sont dignes d'admiration, qui dépensent pour leur cause une énergie à toute épreuve. Même si l'on ne comprend pas l'italien, les images du film-enquête ci-dessous sont terriblement parlantes, qui illustrent admirablement mon propos :




 Et pourtant, les romains aiment le cinéma :

Projection de Mamma Roma en hommage à Anna Magnani - Piazza San Cosimato en Trastevere, juin 2015

4 commentaires:

Anonyme a dit…

Si je puis dire, à Rome que vous essayez de faire revivre l'éclat du film passé, grâce à Walter Veltroni, qui voudraient mettre même un festival. Mais en Italie, est bien connu, les fonds pour la culture sont rares et donc, une certaine crainte pour le Festival du Film de Venise qu'il peut nuire à l'image. Enfin, un autre festival du film, maintenant mort de tous, est de Taormina.In un mot, nous disons que le cinéma en Italie a été abandonné. Et qui a abandonné? sinon un tel souverain dans la télévision privée qui a fait des politiques qui profitent productions stupides, tous qualifiés pseudo-culturelle!
catania

Silvano a dit…

Oui, Catania, c'est exact.
Et le Maire actuel, Marino, est un fantôme.

Pierre a dit…

S'il est vrai que Berlusconi (élu et réélu...) a été l'un des fossoyeurs de la culture en Italie, force est de constater, hélas, que le triste phénomène est commun à toute l'Europe... hormis la France ! grâce aux excellentes lois sous les ministères de Jack Lang, comme le financement (obligatoire) des films via les chaînes de télé – je pense aussi au prix du livre.

Rappelons qu'à peine 10% des films français sont financièrement rentables en salles. Avec la seule logique économique, il n'y aurait plus de cinéma, ni de théâtre, d'opéra, d'orchestres, etc.

Les enjeux de la culture n'ont jamais été matériels – ce qu'avait aussi compris Malraux – mais sont les piliers des civilisations. En Europe, le cinéma est un art, aux USA, c'est une industrie. Seuls (en Occident), les Français résistent, tant bien que mal (mais plutôt bien), aux tentatives hégémoniques, alors qu'il suffirait partout ailleurs d'une simple volonté politique, somme toute bien moins coûteuse que les dégâts occasionnés par l'abandon ultra-libéral.

Il reste encore des festivals (Cannes, Venise, Berlin) pour donner voix au chapitre à un cinéma d'une belle variété dans ses origines, mais ces rares oasis nous donnent aussi l'illusion que le désert ne gagne pas du terrain, chaque jour.

Puisse cette belle jeunesse italienne (non je ne chanterai pas « Giovinezza » !) réussir à revitaliser leur culture pour que s'exprime à nouveau les talents artistiques affleurant à ciel ouvert de ce pays béni des dieux, dans la continuité de quantités de maîtres tonnant du haut de leur Olympe...

« Chi ha arte, ha parte. »

Silvano a dit…

Lu et approuvé ô combien, Pierre !