vendredi 28 mars 2008

Pasolini, un homme libre


"Les mille et une nuits"

Avec Ninetto Davoli : le garçon de sa vie ?

Ninetto, Pier Paolo et Toto

Sur le tournage de "Salo"

En 2005, Pino Pelosi, le prostitué assassin du poète-cinéaste Pier Paolo Pasolini reconnaissait qu’un « commando » de trois hommes avaient battu à mort la victime, le traitant de « sale communiste » menaçant la petite frappe de représailles sur sa famille s’il parlait.
L’enquête policière corroborait pourtant cette version des faits qui aujourd’hui paraît évidente : le crime ne pouvait être le fait d’un jeune homme seul, plus petit de taille que le réalisateur d’Accatone qui était, de surcroît, ceinture noire de judo !

Il est avéré que ce ne sont pas les goûts de P.P.P. pour les jeunes gens, ces « ragazzi » issus des classes populaires, qui dérangeaient, mais bien sa dénonciation permanente de la corruption permanente de la classe politique italienne et du fascisme rampant.

On ne se lancera pas ici dans l’exégèse de la pensée « pasolinienne » tant il semble ardu de tracer un portrait objectif d’un personnage tout en contradictions (marxiste et parfois mystique : son « Evangile selon saint Matthieu » apparaissant comme le meilleur film réalisé sur le « fils de l’homme »).
On préfèrera se souvenir du sourire éblouissant de Ninetto Davoli, l’ami-fils-amant, sautillant sur un chemin de terre, de l’impériale Anna Magnani dans Mamma Roma, des paillardises revigorantes du « Decameron », de la flèche-phallus des « Mille et une Nuits », du visage poétique de Toto dans « Uccellacci e uccellini », de nos réactions mi-perplexes mi-bouleversées devant le tragique « Salo ».
Enfin, il y a « Théorème » où Terence Stamp vient corrompre dans leur chair les membres d’une famille de la haute bourgeoisie, en ange séducteur de nature à damner un Saint.
L’immense Silvana Mangano, dans ce rôle de femme dévastée par l’amour et la passion érotique, y trouve l’un des plus beaux personnages de sa carrière.

Certes, « Salo », « Médée » (avec Maria Callas !) ou « Porcherie » sont des films plus déconcertants, plus « nouvelle vague » ; mais ce sont des œuvres marquantes d’un cinéma italien aujourd’hui exsangue, « berlusconisé », mis à bas par la télévision commerciale, ne bénéficiant pas de ces mesures de protection qui ont permis de sauver le cinéma français (qui risquent d’ailleurs de passer à la trappe dans un futur proche si nous ne sommes vigilants !).

A l’heure où l’on s’apprête à commémorer, chez nous, les évènements de mai 68 et les bouleversements de société qu’ils induirent, que certains voudraient occulter, à l’heure où la frilosité, le consensus mou, gagnent du terrain, ou les humoristes n’osent plus être corrosifs, une personnalité comme celle de Pier Paolo Pasolini, hautement « dérangeante », serait, hélas, plus que jamais baillonnée.

Filmographie.

Bande annonce de "Mamma Roma" :


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