lundi 7 octobre 2013

Tombe, Victor ! (15)

Je voudrais vite recommencer à faire le pédé avec Victor. Le temps d’automne est notre ennemi ; il pleut des océans sur la ville ; on ne sait plus où aller. 
L’autre après-midi, on a vu un péplum au Casino. Il n’y avait presque personne. La vieille de la caisse nous a laissés monter au balcon sans supplément. On s’est mis au fond, sous la cabine, d'où l'on entend la musique des projecteurs. A un moment, j’ai passé un doigt entre deux boutons de la braguette de son pantalon et j’ai caressé sa bite ; il bandait, mais Victor a brusquement enlevé ma main :
-Imagine un peu qu’on sorte avec une énorme tache sur le falzar ! 
C’était vraiment décevant de commencer sans pouvoir terminer.
-Tu as raison, la prochaine fois on prend des mouchoirs !
-Tu perds pas le Nord, toi, a-t-il rigolé.
Quand serons-nous à nouveau ensemble, tout nus l’un contre l’autre, comme à la villa, avant que ces satanées averses ne viennent contrarier notre bonheur ?
... dans une ville qui s'appelle Bergame
Mais Victor a de la ressource. Il m’a annoncé avec un sourire en coin que ses parents et son frère partaient en Italie pour la Toussaint pour se rendre sur la tombe de sa grand-mère maternelle, dans une ville qui s’appelle Bergame.
-Je serai tout seul chez moi pendant quatre jours et demi.
Et il m’a fait l’un de ces clins d’œil qui annoncent toujours de « belles choses ».
Je vais mourir d’impatience. 
J’y pense chaque soir quand je m’affaire dans la housse du traversin. Je compte les jours. De temps en temps, on va écouter des disques dans la cabine du disquaire, mais on ne peut pas y faire grand chose.
J’ai eu le disque de Clo Clo. M. Castelain s’est marré en voyant la pochette :
-Oh, la jolie chemise lie-de-vin !
Il a tout compris, M. Castelain, et il ne s’est pas gêné pour me le faire savoir ! Je commence à avoir de vraies conversations avec lui. Il me rassure, alors qu’il me faisait un peu peur auparavant. Il m’a confié qu’il était époux et père, mais qu’il avait eu des aventures avec des garçons. Je crois que je craignais qu’il ne s’intéresse à moi, ou pire, à Victor, au début. Mais non, il est « rangé », il aime sa femme et son fils qui, m’a-t-il dit, « commence à se branler » et à "dessiner des cartes de France" sur ses draps ! Le disquaire a l’art de dire des insanités avec beaucoup de classe. M. Castelain se prénomme Pierre et voudrait que je l’appelle par son petit nom, mais je n’y parviens pas. Il a demandé, pour Victor et moi, mais je lui ai dit que non. Un secret, c’est un secret. Si je le trahissais, Victor me renierait, et il aurait bien raison. Castelain n’est pas dupe : je sais qu’il sait.
L’autre jour, Victor est entré dans la boutique avec deux garçons que je n’aime pas du tout, des calabrais qui sont à Pasteur, le lycée technique où échouent les bras-cassés que  l’on refuse ailleurs. Les deux gars nous ont regardés, M. Castelain et moi, d’un air goguenard. Le pire, c’est que Victor nous a tout juste salués. Il a honte. Ça me tue. Tant pis si ça me vaut une de ses colères du feu de Dieu, mais je le lui dirai quand on sera seuls : ce que nous faisons tous deux n'est pas écrit sur nous.
(A suivre)

(c) Silvano Gay Cultes 2013
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... on a vu un péplum au Casino. NdS : était-ce Spartacus avec, ci-dessus, John Gavin en Jules César ?



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