lundi 26 janvier 2015

Love Is Strange : l'amour est universel


Il y a du Woody Allen dans ce film très inspiré d'Ira Sachs ; pas le Woody Allen des tout derniers avatars en forme de dépliant touristique avec zeste d'humour - il lui en reste ! -, non, du Woody à son meilleur d'il y a longtemps déjà, de Manhattan à Hannah et ses sœurs dont Sachs reconnaît humblement l'influence.
Le synopsis suffit à allécher le chaland en quête d'émotion :

Ben et George attendaient ce jour avec impatience : après 28 années de vie commune, ils vont enfin se marier. Ils ont réuni tous leurs amis, très heureux pour eux. Le couple les mettra bientôt à contribution quand George perd son emploi de professeur de musique. Tout le monde savait qu' ;il était gay, mais son union officielle avec Ben a braqué des parents d'élèves... Contraint de déménager, le couple demande donc à son entourage de les héberger. Séparés par la force des choses, Ben et George font le point sur leur relation...


Avec son "étrange amour", Ira Sachs réussit le tour de force de nous émouvoir constamment sans jamais verser dans le pathos, y compris dans les toutes dernières scènes, qu'un tâcheron eût pu lacrimoser* à outrance.  
Il montre l'universalité flagrante de l'amour, évite le piège de la production ciblée "film de pédés pour pédés" au même titre que des films aussi grand-public que Brokeback Mountain ou, dans une moindre mesure, le Maurice de James Ivory.
La qualité première de son film est la subtilité avec laquelle il évoque la relation des deux protagonistes principaux avec des proches qu'un tout petit événement - aïe aïe aïe, un bel ado dans le jeu de quilles ! - va confronter à de vieux préjugés qu'ils croyaient enfouis. 
Joey (... ) réalisant son égarement
Le mariage de ces deux hommes (John Lithgow et Alfred Molina, formidables !) épris l'un de l'autre depuis tant d'années, est une fête, considéré par tous comme chose légitime jusqu'au moment où les aléas de  l'existence provoqueront un lent délitement des relations : ainsi, le jeune Joey, épouvanté à l'idée que son meilleur copain puisse être un peu plus ouvert que lui à la différence, affichera un comportement odieux jusqu'au dénouement, réalisant son égarement en ces dernières minutes que le réalisateur parvient à sauver adroitement du poncif.
Magnifique histoire d'amour, Love is strange laisse le spectateur ému, certes, mais optimiste quand à l'évolution de la société, malgré le vol des oiseaux de malheur au-dessus de nos têtes, malgré les résistances au nécessaire progrès des mœurs, en dépit de la bêtise et de l'aveuglement de certains.
Un film nécessaire.

*J'ai "fait latin" au lycée...

7 commentaires:

  1. Y entend on " A strange kind of love"?

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  2. Vous traduisez exactement ce que j'ai ressenti, merci.
    Antonin

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  3. Love is Strange se traduirait plutôt comme: L'amour est étrange.

    Joseph dit:"A strange kind of love" qui se traduirait par: Une étrange sorte d'amour.

    Tout dépend quel sens on veut donner au sujet du film.

    Pas toujours évident que ceux qui en traduisent les titres y font vraiment attention.

    Je suis parfait bilingue depuis 1954 ET ai enseigné l'anglais langue seconde pendant 8ans.

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  4. Très bel article pour un film élégant et intelligent. Vous avez le don de mettre des mots sur nos émotions passagères Silvano. Merci.

    Clément

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  5. JiEL, et l'humour anglais ne permet il plus de jouer avec les mots en y associant la musique, langane universel s'il en est!

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  6. @Joseph..

    Tout est matière à interprétation...

    On y entend ce que l'on veut bien, par le cœur subjectif ou la raison objective.

    À chacun d'y voir ou entendre ce qui le touche vraiment...

    D'où l'intérêt d'une expression artistique.
    (Ps. je suis un artiste en arts visuels et enseignant en arts plastiques aussi.)

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  7. Au passage, merci à Antonin et Clément.

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