lundi 24 août 2015

Ma vie est super-intéressante !

Primate, siècle XXI - Autoportrait - Domaine public
De mes séjours en Italie, je retiens, cette année, la montée en puissance de la "perche-à-selfie", nouveau gadget en vogue, que l'on peut se procurer, à Naples, par exemple, à chaque coin de rue, vendue par le tout-venant des vendeurs "à la sauvette".
France Inter, la semaine dernière, consacrait une émission à la mode des "selfie", symbole récurrent d'un exhibo-narcissime qui s'étale avec auto-complaisance sur les réseaux sociaux ; émission que l'on peut réécouter ici : clic
Les progrès technologiques ont fait de nos téléphones de puissants appareils-photos qui mettent la pratique de cet art à la portée de tout un chacun. Las, et bien évidemment, l'homo-sapiens n'aime rien tant que casser ses jouets, détournant cette formidable opportunité de "faire du beau" ; il en fait donc un usage frénétique et irraisonné, scotché à l'objectif comme je pus le constater récemment : au Musée National de Capodimonte (indispensable visite à Naples), l'autre jour, nous fumes prévenus que les salles du deuxième étage ne seraient ouvertes au public que pour un laps de temps restreint, dû sans doute, même si non avoué, au manque de personnel.
C'est à ce niveau que sont visibles les plus belles œuvres du musée, dont la célèbre Flagellation du Christ du Caravage.
Vite, une photo !
Rendez-vous était donné près du grand escalier, où, à l'heure dite, se coagulait la foule des visiteurs. Je fus frappé de constater que nombre d'entre eux pénétrait dans la première salle l’œil rivé à l'objectif de leur "smartphone" ou de leur tablette (je ris, à chaque fois, du recul évident de la miniaturisation !).
Il est amusant - attristant, plutôt !  - de penser que certains ne virent les chefs-d’œuvre que par l’œilleton de leur précieux doudou, quand tout, en ces lieux, incite à la contemplation.
Ne jetons pas, pour autant, le bébé avec l'eau du bain : si je trouve quelque peu dérisoire de photographier des merveilles que l'on peut trouver aisément reproduites sur le Net, dans toute leur splendeur, saisies par des objectifs professionnels - si ce n'est pour, on peut le comprendre, dire "j'y étais, je l'ai vu de mes yeux" - je reconnais que, piètre photographe, le numérique me donne l'occasion de graver mes souvenirs de voyages, et, ainsi, d'alimenter cette chronique. 

Photo "officielle" (Museo Nazionale di Capodimonte) - Peut-on faire mieux ?

7 commentaires:

  1. Nous sommes aujourd'hui littéralement noyés sous les images, pour le meilleur et malheureusement plus souvent pour le pire. Ce réflexe du "selfie" en est certainement le symptôme le plus inquiétant : chez les touristes, les badauds, les célébrités mais aussi les terroristes...

    On ne peut plus vivre un événement, heureux ou dramatique, sans aussitôt le filmer ou le photographier ; avez-vous remarqué par exemple que ces héroïques Américains du train Thalys se sont eux aussi emparés aussitôt de leur téléphone pour filmer au plus près la scène de terreur qu'ils étaient en train de vivre ?

    Les Italiens sont souvent à l'avant-garde de ces nouvelles pratiques : je suis assez âgé hélas pour me souvenir des premiers "telefonini", ces téléphones portables (assez volumineux, semblables à des talkies-walkies) que l'on voyait couramment dans les rues de Rome ou de Florence alors qu'ils étaient encore rarissimes à Paris. On ne devrait donc pas tarder à voir apparaître ici la "perche à selfie" dont vous nous parlez !

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  2. Le comble ...Nos "idoles" ne voient de nous que les lentilles des objectifs portables...hier ils lisaient notre admiration dans nos yeux...
    (Marcel)

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  3. Emmanuel F. : la perche est déjà arrivée...

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  4. Marcel : joliment dit, et pertinent.

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  5. Comme vous avez raison, et que cela est affligeant ! Je peste régulièrement, lors d'expositions temporaires au Louvre, où les visiteurs, le nez plongé dans leurs technologies, sont incapables de regarder l’œuvre devant leurs yeux, d'en apprécier directement les détails : leur perception n'est rendue possible que par la médiation d'un objet où l'image fétichisée paraît, dès lors, seule acceptable, l’œuvre devenant la « preuve » de l'objet, et, accessoirement, la raison de leur présence au musée.

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  6. Il ne m'est jamais venu à l'esprit d'entrer dans un musée muni d'un appareil quelconque permettant une prise de vue. Si la lumière traverse un objectif je ne suis pas certain qu'il en soit de même pour l'émotion (du moins pour nos clichés d'amateurs plus ou moins avertis).
    Joël

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