Ange ou démon ?
...sa peau qui fleurait bon le sel d’une récente baignade. |
Yann lui a demandé s’il pouvait dormir chez lui, « en tout bien tout honneur ».
« Défense
de toucher ! » avait-il prévenu avant de sombrer dans le plus profond
des sommeils.
Ce
fut un délicieux supplice d’être allongé, là, aux côtés de ce jeune dieu vêtu
d’un simple slip blanc.
La
jambe rampait sous le drap, millimètre par millimètre ; se rapprocher,
être au contact de sa peau, sentir son souffle, veiller à ne pas brusquer les
mouvements, souffrir.
C’était
bon.
Le
sommeil ne vint pas apaiser cette agréable douleur.
Au
lever, le Breton balbutia un « bien dormi ? » qui appela un
mensonge.
Il
fit un bond hors du lit.
Bill,
à son tour éveillé, jappa et montra son bonheur de retrouver son maître.
Paul
vit son camarade en petite tenue se diriger vers la salle de bains ; Yann
se savait observé, détaillé de pied en cap ; peut-être souriait-il.
On
n’entendit pas le bruit du verrou de la pièce d’eau avant que le ruissellement
sur la peau de Yann ne soit perceptible, finissant d’achever la victime.
Le
brunissime surgissait maintenant à toute heure du jour, « pour
parler » ; il avait trouvé en Paul l’interlocuteur idéal, le complice
auquel il racontait ses histoires de cœur, inconscient des souffrances qu’il
lui faisait endurer.
Parfois, lorsque il était trop tard pour repartir, Yann dormait chez Paul ; et
chaque fois recommençait ce jeu dont on ne sait s’il était innocent ou
pervers ; le beau noiraud eut quelque temps cette attitude ambiguë ;
quelques siècles pour Paul s’écoulèrent.
Yann
sortait alors avec une fille blonde, de celles qui font rêver les jeunes mâles aimantés par le sexe opposé.
Josepha
était membre d’une famille corse qui possédait quelques-unes des plus belles
affaires de bars, restaurants et autres night-clubs de la contrée.
Pour
ses camarades, admiratifs et envieux à la fois, elle était « la fille G. ».
Au
premier abord, on pouvait penser qu’elle était une fille à papa frivole ;
quand elle se déhanchait, short en jean effrangé, chemise nouée au-dessus du
nombril, devant le Jukebox de la plage des Grandes Rives, mille cœurs masculins
battaient de concert.
Yann
l’avait conquise d’un seul regard, tant l'archange
celte irradiait parmi le tout venant des baigneurs.
Jo
l’aimait, comme elle le gardera au cœur pour toujours, avec cette gratitude que l’on éprouve pour qui vous a fait
découvrir l’amour à seize ans.
Sûr
du pouvoir qu’il exerçait sur un Paul envoûté, une réelle amitié unissant à
présent les deux garçons, Yann en vint, un été, à solliciter le prêt de son studio
pour héberger de temps à autre ses amours avec la belle lycéenne.
La
remise des clés se faisait au bar de la plage et l’on convenait d’une heure
limite, en fin d’après-midi, où Paul pouvait regagner la garçonnière.
Il
rentrait à l’heure prévue, trouvant les deux amants rassasiés conversant sur le
canapé de simili cuir.
Un
jour, ce jour, le garçon, ponctuel pourtant, les surprit sur le lit, nus, en
grande conversation.
Interloqué,
Paul n’était pas au bout de ses surprises.« Ah,
Paul, tu vas pas me croire, ricana l’archange, Jo est nulle en
fellation ! »
Josepha
levait les yeux au ciel, gestes de dénégation à l’appui.
« Je
lui ai expliqué pourtant cent fois, pas moyen ! Comme si ça la dégoûtait.
Montre-lui !
Oui,
montre-lui comment on fait, je suis sûr que tu fais ça super bien. Et toi, ma
chérie, tu regardes et t’apprends, c’est pas compliqué ! »
L’embarras
de Paul, qui n’était plus à un supplice près, n’était pas feint, bégayant à son ami
« d’arrêter ses conneries ».
Inconscient
de l’incongruité de la situation, Yann insistait, avec une soudaine fermeté.
Jo
souriait ; son regard s’était fait interrogateur : c’était clair,
elle consentait.
Paul
finalement chavira, se penchant sur son ami et fit se redresser le membre inopportunément
alangui.
Yann
ne donna à entendre le moindre son, yeux clos, sourire aux lèvres, pendant que son
ami le menait à l’extase ; Paul sentit que pendant qu’il s’en occupait, Jo
les observait, pétrifiée.
Yann
jouit à flots tumultueux sur sa peau qui fleurait bon le sel d’une récente
baignade.
Souriant,
admiratif, extatique, il dit :
« Eh
ben voilà : ça c’est une pipe ! »
(à suivre)
(c) Louis Arjaillès pour Gay Cultes
Illustration : le plongeur Takeshi Katana photographié par Ken Kasuga
Merci! L'attente continue...
RépondreSupprimerIllustration : le plongeur Takeshi Katana photographié par Ken Kasuga (sur Flickr et Pinterest)
RépondreSupprimerMerci André.
RépondreSupprimerCes tranches de vie joliment rédigées sont elles autobiographiques ?
RépondreSupprimerJe viens de commander votre roman dont j'attends la réception avec impatience.
Antoine : on peut les considérer comme étant de l'autofiction.
RépondreSupprimerQuel régal de vous relire à nouveau! C'est toujours aussi agréable et plaisant ! Vivement la suite !
RépondreSupprimerMellitus a si bien résumér mon plaisir de lecture que je ne piperai plus mot
RépondreSupprimerrésumé , ah ce clavier trop peu tempéré
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