1937, un village de l'Aveyron. Deux adolescents, Claude (le narrateur) et Jean vivent une relation interdite, jusqu'alors préservée de la rumeur. Trois personnes, au village, leur apportent un soutien complice : Jacob Epstein, un vieil excentrique accueille leur amour dans sa maison isolée sur les hauteurs. Clément Chaumard, le fils du boulanger, est ostracisé en raison d'un psoriasis qui affecte son apparence. Solange Gleizes est une pocharde venue de Montpellier où elle a vécu des événements dramatiques. Cette femme sans âge, errant sans relâche dans le village, sait tout des turpitudes de ses concitoyens. Elle a surpris les agissements de Pierrette, la fille du Maire, que les garçons viennent peloter le dimanche dans la salle municipale. Les deux amants embusqués ont observé le manège, découvrant des turpitudes qu'ils étaient loin d'imaginer. Excités, ils gagnent leur "refuge" un temps délaissé.
Notre vieux copain si jeune, heureux de
nous revoir, nous a accueillis avec joie et sans barguigner nous nous sommes
précipités vers la chambre, gravissant quatre à quatre les marches de
l’escalier qui menait au septième ciel pour y gagner la délivrance.
Jamais chair ne fut moins triste qu’entre
nous. Nous nous amusions de ces différences anatomiques comparées avec
curiosité, nous flairant comme des chiots frétillants d’aise ; Jean cabriolait sur le matelas de laine puis se relevait pour exhiber sa virilité triomphante - « t’as
vu, c’est ça un homme ! » - avant de fondre sur moi en rapace. Quand l’un
s'offrait à l'autre, dans la position qui permet l’échange des regards, le sourire
affleurait toujours, comme pour encourager l’accomplissement. Nos partages
furent continuellement joyeux. Nous avions quinze ans et j’aurai quinze ans jusqu’au
dernier moment, tant que ton souvenir me tiendra compagnie.
Une fois étanchée notre soif de caresses, après quelques sommaires ablutions,
Jacob, que nos sonores facéties, là-haut, avaient mis en joie, ouvrit une
bouteille de Saint Raphaël Quinquina pour fêter nos retrouvailles. Jeannot fit un récit à se tordre de rire du spectacle auquel nous avions assisté ce jour-là. Sur le
phonographe notre ami a joué Y a d’la joie par Maurice Chevalier sur laquelle
nous avons dansé frénétiquement en poussant des hurlements de louveteaux.
Ce
soir-là, loin d’imaginer que je pouvais m’être enivré, ma mère, devant mon
euphorie, me demanda si tout allait bien. Mon père, plus au fait des effets
pervers de l’alcool, me jeta des regards suspicieux en fronçant les sourcils.
Au cours du souper, je m’enhardis – le
vin cuit faisait-il encore son œuvre ? – à évoquer la suite de mes études.
Il me restait deux ans avant le baccalauréat, un
diplôme qu’aucun de mes camarades, à l’exception de Jeannot s’il se décidait à
travailler, ne pouvait briguer. La plupart d’entre eux, au demeurant, n’avaient
pour d’autre ambition que de demeurer au village ou dans les environs immédiats
et d’exercer la même profession que leur géniteur. Quatrefages débiterait de la
saucisse, Verdeille se voyait travailler la vigne près de Millau aux côtés de
son oncle tandis que Pichon espérait trôner un jour au comptoir du bistrot
paternel. Tous, cependant, exprimaient le désir de moderniser l’entreprise
familiale, espérant peut-être donner un souffle nouveau à une bourgade qui
sombrait dans la léthargie.
(À suivre)
© Louis Arjaillès - Gay Cultes 2022
Cher Silvano, le choix du patronyme "Epstein" est-il des plus heureux, eu égard à certaine actualité pas tout à fait defraîchie ?
RépondreSupprimerSeb
Que j'aimerais partager leurs ébats!
RépondreSupprimerMerci, Silvano.
uvdp : merci, je craignais d'avoir un temps d'avance, vous me rassurez.
RépondreSupprimerSeb : damned ! Mais rien n'est définitif, c'est quasiment un brouillon, vous savez. Je vais l'appeler Hervé Weinstein.
;D
Pippo : mais eux ?