mardi 15 octobre 2024

Le bel endormi


Au cours de ma onzième année, comme nous étions en vacances chez la grand-mère au cœur d'un août brûlant, je poussai un matin la porte de la chambre de mon grand-frère. Lui n'y était pas, mais un ange brun habitait le lit, un Jean-Jacques de dix-huit ans que le drap blanc couvrait à peine jusqu'à la naissance d'une brune toison. La peau était rose, pas encore brunie par le soleil du midi. Un bras était replié sur le front, les lèvres me semblèrent d'un rouge-vif, « purpurin » lirait-on dans un ouvrage désuet ; le haut de son corps, offert à mon regard, se soulevait lentement, métronomique-ment, au rythme de sa respiration ; l'épiderme était souple, lisse, velouté, en appel irrésistible à la caresse.
Une jambe dépassait du lit, le pied reposant sur le sol de ciment brut ; la cuisse était ferme, épaisse, le genou était fort, où subsistait une trace d'un récent accident de "Vélo Solex" ; le mollet musclé s'abritait sous une fine couche de poils bruns qui bouclaient un peu si l'on remontait jusqu'où palpite le grand Mystère.
Pétrifié, j'ouvrais des yeux ronds, là, sur le pas de la porte.
Le jeune homme a ouvert brièvement les yeux, juste assez, je crois, pour m'apercevoir le détaillant avec émotion.
Devant le café noir, peu après, dans la salle commune, j'ai cru intercepter un clin d’œil qui me hante encore.
(c) Silvano Mangana - Gay Cultes 2015


2 commentaires:



  1. Très joli rappel, je me souviens bien de ce chapitre......

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    1. Merci cher "???" : ce n'était qu'un texte spontané qui n'a jamais été édité.

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