Le journal quotidien - non hétérophobe - de
Silvano Mangana (nom de plume Louis Arjaillès). Maison de confiance depuis 2007.

"La gravité est le plaisir des sots"
(Alexandre Vialatte)


lundi 21 août 2017

La musique et la France : une relation en dents de scie

Au cours de la soirée musicale au Castel Meraccio de Bolzano/Bozen, je rencontrai Marco Mandolini (si !), premier violon de l'orchestre symphonique Haydn de Bolzano e Trento, orchestre de la région, donc, l'une des plus prestigieuses phalanges de la Péninsule.
Marco Mandolini est né au Québec de parents italiens, fut formé dans la "belle province" et retourna à ses racines pour jouer dans le prestigieux orchestre de la Scala de Milan, avant de rejoindre sa formation actuelle.
Marco Mandolini
Au cours de notre brève mais vivace conversation, nous nous livrâmes à une sorte d'état des lieux de la musique en nos contrées respectives. Je lui avais dit auparavant combien j'avais été émerveillé de l'excellente tenue du "petit" orchestre de cordes local qui occupait la scène ce soir là.
Il me dit que l'influence de l'Autriche et de l'Allemagne avait été déterminante en sa belle région, où tout était fait en matière d'éducation musicale, où, vous l'avez-vu dans mes carnets de voyage, la proximité, entre autres, de Salzbourg, fait qu'on y honore Mozart jusqu'à donner son nom à un café proche du théâtre communal, lequel, soit dit en passant, est un hideux cube de béton indigne des édifices avoisinants.
Ainsi, actuellement, à Bolzano, de jeunes musiciens sont en résidence jusqu'à la fin du mois, dont l'Orchestre Européen des Jeunes et le prestigieux Gustav Mahler Jugendorchester, dit GMJO.

Non, ce n'est pas un club de foot !
Jean-Yves Thibaudet
Si, chez nous, fleurissent les banderoles célébrant la tenue à Paris des jeux olympiques, ou l'intégration au Qatari-Saint-Germain d'un footballeur "acquis" pour plus de cent Millions d'euros, ici, la commune et la population ne craignent pas d'afficher sur la Place Walther leur fierté d'accueillir ces musiciens qui interprèteront du Messiaen (un Français !), du Schoenberg, et le Concerto en Fa de Georges Gershwin avec Jean-Yves Thibaudet, grand pianiste français de mère allemande qui vit entre Los Angeles et Paris avec Paul, son compagnon. Pour la petite histoire, Thibaudet décline, depuis très longtemps, toute invitation si son partenaire ne lui est pas associé !
Avec mon interlocuteur, nous dressâmes un bref panorama de la musique européenne, où domine toujours l'Orchestre Philharmonique de Berlin, dont la direction musicale, de sa création à nos jours fut assurée par les plus grands Chefs de l'histoire de la musique contemporaine.
Avant que l'on m'accuse de déclinisme ou de débiter des "clichés" (j'ai pris la mouche, l'autre jour !), je précise que je lui dressai un tableau flatteur de notre récente Philharmonie de Paris qui, selon moi, permet au mélomane d'assister à des concerts dans les meilleures conditions et d'applaudir dans une salle à leur mesure les meilleurs chefs et les plus grands solistes internationaux.
Jean-Philippe Rameau par Greuze
Même si, de nos jours, la musique, et la culture, en général, semblent si éloignées des préoccupations de nos concitoyens et des pouvoirs publics (notre nouveau Président tiendra-t-il ses promesses en la matière ?), l'histoire de la musique française (mais aussi, c'est mon "job", du piano français) est faite de grandes pages, nonobstant (content de l'avoir placé, celui-là !) des périodes de vide sidéral et sidérant : concerto grosso modo, la période baroque vit l'éclosion de musiciens de génie tel Jean-Philippe Rameau (le plus grand, selon moi), Couperin, Lully (venu d'Italie, certo !), et tant d'autres qui bénéficièrent de la munificence du Roi Soleil (j'affame, mais j'aide les Arts !). Puis, plus rien pendant plus d'un siècle, juste des petits-maîtres, éclipsés par les génies classiques allemands et les maîtres de l'opéra italien,  avant l'arrivée d'un Berlioz qui n'est pas l'un de mes préférés, mais qui n'est pas rien tout de même.

C'est l'après-romantisme qui marque la résurgence, et là, c'est un feu d'artifice : comment, citant ceux qui me viennent, Franck, Saint-Saëns, Fauré, Bizet, Gounod, Debussy, Ravel, Satie, Poulenc,  ne pas en oublier ?
La période que l'on appellera "moderne" se fait plus chiche, nous donnant Dutilleux (que je vénère !), Boulez, Olivier Messiaen, ou, en récupération, Xenakis et Varese. (1)
Des hauts et des bas, en attendant avec optimisme, que revienne une musique française... au top ! 

Francis Poulenc


Supplément gratuit joli : 


(1) Note (vers midi) : 
j'aurais pu ajouter des compositeurs qui œuvrèrent notamment pour le cinéma, comme Henri Sauguet, Arthur Honegger, Georges Auric... (je ne peux être exhaustif). 

11 commentaires:

joseph a dit…

Superbe panorama et je partage votre enthousiasme concernant le Philarmonique de Paris bien que je n'ai eu le plaisir de l'entendre que via la petite lucarne (je me console en "vivant" avec le Royal Philarmonique de LIEGE, qui a eu le mérite de grandir en accueillant à sa tête quelques chefs français, dont j'ai pu partager des moments de travail -en tant qu'ami de l'Orchestre- et en contact avec un altiste également bénévole dans des coopérations avec des moins valides) !

pepito a dit…

hmmm... Poulenc m'a surtout l'air d'être Claude Laydu, l'acteur du "journal d'un curé de campagne" de Bresson...

Ludovic a dit…

Voici encore une chronique qui honore ce site de tous les plaisirs et qui figurera certainement en bonne place dans l'édition de la Pléiade à laquelle vous n'échapperez pas, sinon de votre vivant, du moins à titre posthume. Je suppose toutefois qu'une note infrapaginale s'étonnera respectueusement, de votre oubli, volontaire ou non? de Messiaen dans la liste des grands compositeurs de l'époque moderne.

Silvano a dit…

pepito, merci : effectivement, clic... impromptu (car laydu fut aussi Schubert), je vais corriger derechef.

Silvano a dit…

Ludovic : oui, c'est un oubli, et je l'ajoute à la liste, merci.

Souvenir aixois a dit…

Si elle ne sait pas toujours faire éclore ses talents, la France sait tout de même accueillir ceux éclos sous d'autres hospices... Au festival d'Aix, un petit instant de grâce (à tous points de vue) polonaise:

https://www.youtube.com/watch?v=yF4YXv6ZIuE

Si la certification GC existait, ne lui donnerait-on pas ?

Silvano a dit…

Souvenir aixois : la certification GC, bien sûr, d'autant que j'ai diffusé cette vidéo il y a quelques semaines ! Les grands esprits...

Arthur P. a dit…

Il est déjà à l'hospice, ce garçon ?

Silvano a dit…

Arthur P. : P comme perfide ?

Celeos a dit…

Je rajoute que Claude Laydu fut l'auteur inénarrable de "Bonne nuit les petits" et la voix du marchand de sable. Je l'entends encore dans les yeux de Manu...

Xersex a dit…

que dites de ca
https://youtu.be/KOfdIM6gD-U

performance abominable du chœur à 3.10. La Divina les doit conduire!

Ils semblent lire pour la première fois!
Pauvre Divina! et pauvre Bellini!