Le journal quotidien - non hétérophobe - de
Silvano Mangana (nom de plume Louis Arjaillès). Maison de confiance depuis 2007.

"La gravité est le plaisir des sots"
(Alexandre Vialatte)


mercredi 16 octobre 2024

Jolie chemisette

 


Chatbadabada



Le bon chatmaritain

 "Je fus sauvé par un chat. Son museau apparut brusquement devant moi entre les bûches, et nous nous regardâmes un instant avec étonnement. C'était un incroyable matou pelé, galeux, couleur de marmelade d'oranges, aux oreilles en lambeaux et avec une de ces mines moustachues, patibulaires et renseignées que les vieux matons finissent par acquérir à force d'expériences riches et variées.

Il me regarda attentivement, après quoi, sans hésiter, il se mit à me lécher la figure.
Je n'avais aucune illusion sur les mobiles de cette soudaine affection.
J'avais encore des parcelles de gâteau au pavot répandues sur mes joues et mon menton, collées par mes larmes. Ces caresses étaient strictement intéressées. Mais cela m'était égal. La sensation de cette langue râpeuse et chaude sur mon visage me fit sourire de délice - je fermai les yeux et me laissai faire - pas plus à ce moment-là que plus tard, au cours de mon existence, je n'ai cherché savoir ce qu'il y avait exactement derrière les marques d'affection qu'on me prodiguait. Ce qui comptait, c'est qu'il y avait là un museau amical et une langue chaude et appliquée qui allait et venait sur ma figure avec toutes les apparences de la tendresse et de la compassion.
Il ne m'en faut pas davantage pour être heureux
Lorsque le matou eut fini ses épanchements, je me sentis beaucoup mieux. Le monde offrait encore des possibilités et des amitiés qu'il n'était pas possible de négliger. Le chat se frottait à présent contre mon visage, en ronronnant. J'essayai d'imiter son ronron, et nous eûmes une pinte de bon temps, en ronronnant, tous les deux, à qui mieux mieux. Je ramassai les miettes du gâteau au fond de ma poche et les lui offris. Il se montra intéressé et s'appuya contre mon nez, la queue raide.
Il me mordit l’oreille. Bref, la vie valait à nouveau la peine d'être vécue. Cinq minutes plus tard, je grimpais hors de mon édifice de bois et me dirigeais vers la maison, les mains dans les poches en sifflotant, le chat sur mes talons.
J'ai toujours pensé depuis qu'il vaut mieux avoir quelques miettes de gâteau sur soi, dans la vie, si on veut être aimé d'une manière vraiment désintéressée."
Romain Gary, La Promesse de l’aube


mardi 15 octobre 2024

Piano du matin, pas de chagrins

Donnez-nous notre Bach de chaque jour !

Le bel endormi


Au cours de ma onzième année, comme nous étions en vacances chez la grand-mère au cœur d'un août brûlant, je poussai un matin la porte de la chambre de mon grand-frère. Lui n'y était pas, mais un ange brun habitait le lit, un Jean-Jacques de dix-huit ans que le drap blanc couvrait à peine jusqu'à la naissance d'une brune toison. La peau était rose, pas encore brunie par le soleil du midi. Un bras était replié sur le front, les lèvres me semblèrent d'un rouge-vif, « purpurin » lirait-on dans un ouvrage désuet ; le haut de son corps, offert à mon regard, se soulevait lentement, métronomique-ment, au rythme de sa respiration ; l'épiderme était souple, lisse, velouté, en appel irrésistible à la caresse.
Une jambe dépassait du lit, le pied reposant sur le sol de ciment brut ; la cuisse était ferme, épaisse, le genou était fort, où subsistait une trace d'un récent accident de "Vélo Solex" ; le mollet musclé s'abritait sous une fine couche de poils bruns qui bouclaient un peu si l'on remontait jusqu'où palpite le grand Mystère.
Pétrifié, j'ouvrais des yeux ronds, là, sur le pas de la porte.
Le jeune homme a ouvert brièvement les yeux, juste assez, je crois, pour m'apercevoir le détaillant avec émotion.
Devant le café noir, peu après, dans la salle commune, j'ai cru intercepter un clin d’œil qui me hante encore.
(c) Silvano Mangana - Gay Cultes 2015


Regrets éternels

 

Maggie Smith

lundi 14 octobre 2024

Affolant, non ?


 

L'amour obscur

J'ai peur de perdre la merveille
de tes yeux de statue, et l'accent
que, pendant la nuit, pose sur ma joue
la rose solitaire de ton haleine.
J'ai peine à n'être en cette rive
qu'un tronc sans branches ; et ce qui me désole est de ne pas avoir la fleur, pulpe ou argile, pour le ver de ma souffrance.
Et si toi, tu es mon trésor occulte,
si tu es ma croix, ma douleur mouillée,
si je suis le chien de ton domaine,
ne me laisse pas perdre ce que j'ai gagné
et décore les eaux de ton fleuve
avec les feuilles de mon automne désolé.

Federico Garcia Lorca
Sonnets de l'amour obscur (Poésies IV - Gallimard)

Ce cher Marcel

 




dimanche 13 octobre 2024

Souriceaux champêtres

Sourire dominical

 

Tyler Otto
Bon
dimanche !

Brahms accompagne Michel Blanc

 Sans égaler l'extraordinaire Michel Simon de Panique (Julien Duvivier-1947), Michel Blanc est excellent dans Monsieur Hire (Patrice Leconte-1989), sans doute l'un de ses meilleurs rôles. Les deux films sont adaptés du roman de Georges Simenon, Les fiançailles de Monsieur Hire.
Dans le film de Leconte, cet extrait du Quatuor N°1 en sol mineur opus 25 de Johannes Brahms revient en leitmotiv, renforçant l'atmosphère angoissante de ce "remake" qui n'en est pas un.
Voici ce thème, interprété par Émilie Weibel, violon, Darryl Bachmann, alto Gabriel Esteban, violoncelle et Margarita Ilieva, piano, lors du Concert Jeunes Talents (2015) du Festival Puplinge Classique. Une version sans doute pas très aboutie, mais qui nous remet en tête (pour la journée ?) cette œuvre lancinante :








Michel Blanc
et
son prédécesseur,
Michel Simon

L'Italie gourmande en concert à Pleyel


Plus de concerts de musique dite classique, Salle Pleyel, depuis la création de la Philharmonie. Si la programmation du lieu est aléatoire, le deuxième étage vaut le détour, où exerce le chef sarde Emilio Giagnoni (Noto Paris).
Pour ne pas (trop) se ruiner, on dégustera ce magnifique "vitello tonnato" et cette "pasta cacio e pepe" dont je donnai la recette ici même il y a peu :

samedi 12 octobre 2024

Je lis au lit. Et vous ?


Chez le libraire : les deux derniers suppliciés pour "bougrerie"


Paris, 6 juillet 1750. Bruno Lenoir et Jean Diot meurent étranglés puis brûlés en place de Grève. Ils seront les derniers condamnés à mort pour homosexualité en France. Plonger dans les documents judiciaires ayant mené à leur exécution permet de reconstituer le Paris des années 1750 et le milieu homosexuel tenu secret malgré sa banalité.
Entre réalité et fiction, ce roman propose de donner vie et corps à ces deux hommes, dont l’histoire tragique reflète autant les errements judiciaires d’une société complexe que l’intemporel combat pour la tolérance.

« On entre dans ce livre par la fiction et on en sort percutés par la réalité de son histoire. Le premier roman de Pauline Valade, construit à partir d’archives et d’imaginaire, rend le lecteur captif d’un récit dont il connait pourtant déjà le dénouement. » Le Monde


Joli film

Louis Hoffman et Jannick Schümann | Center of my world
(Titre original Die mitte der welt)
Titre français : Moi et mon monde (2016)

vendredi 11 octobre 2024

Inséparables à jamais

 

Pier Paolo Pasolini et Ninetto Davoli
Aujourd'hui, 11 octobre,
Ninetto a 76 ans.


Donne moi ton cœur

Luciano Camilleri par David Macke

Duncan et Paul, une longue histoire

 

Duncan Grant : Paul Roche allongé 1947

Duncan Grant

Paul Roche (1916-2007) était un poète et romancier britannique célébré pour ses traductions des grands auteurs classiques grecs.
Entré dans les ordres, il abandonna la prêtrise en 1950 pour entretenir en toute sérénité sa relation avec le peintre Duncan Grant, jusqu'à la mort de celui-ci en 1978.
Roche était père de cinq enfants. Comme quoi, l'un n'empêche pas l'autre, comme on dit.
Grant, lui, était homo avec des tendances bisexuelles. Beau gosse, il eut de nombreuses liaisons, dont l'une avec l'écrivain et éditeur David Garnett, lequel, après la fin de leur relation, épousa... la propre fille biologique de son ex-amant !
Et dire que certains mènent une existence monotone...

Plouf

 

Giacomo Giannotti dans la série Inganno (Netflix)


jeudi 10 octobre 2024

Frimas d'automne

Avec ce temps, surtout ne prends pas froid.
Pense à mettre une petite laine.

 

Joey : pas si "gore" que ça

Joey Gore par Hard Cider 

 

Piano du matin : une main gauche très adroite

Interprétation magistrale de la fameuse Chaconne de Bach transcrite
pour la seule main gauche par Johannes Brahms.
Alexandre Kantorow est un très grand.

 

Spartacus tout nu

 

Cette affiche artistique du film de Kubrick fut créée par Reynold Brown en 1960.
Faut-il préciser qu'elle ne bénéficia d'aucune sortie publique ?