Les lecteurs de mon ouvrage en papier recyclé se souviennent peut-être que le narrateur, Paul, aime à se déhancher sur les chansons de Claude François. C'est sa manière à lui de s'évader pour un instant des exercices de doigts journaliers imposés par l'apprentissage quelquefois contraignant du piano. Pour sa défense, si besoin était, on notera qu'à l'époque, la diffusion de la musique ne se faisait que par très peu de médias : radios dites périphériques et télévisions d'état soigneusement bétonnées, ne faisaient que peu de place à la chanson anglo-saxonne, et c'est à travers les adaptations de plus ou moins bonne facture des "idoles" que les jeunes des quartiers populaires avaient accès à la musique rythmée.
J'y pensais évidemment l'autre soir en découvrant une émission sur le gringalet frénétique diffusée sur... Arte !
Tant d'années après la mort du blondinet bondissant (c'était en 1978), une sorte de mea-culpa généralisé s'est répandu sur les ondes et dans la presse : il semble de moins bon ton, aujourd'hui, d'adopter une posture méprisante à l'égard du "populaire", telle qu'elle fut affichée par l'intelligentsia de l'époque.
L'émission de l'autre soir (que l'on peut voir en "replay" sur Arte+7) avait le mérite, bien regardée, de mettre l'accent sur la fantastique énergie de cet homme qui sut toucher au cœur une France que d'aucuns qualifieraient dédaigneusement de "profonde", qui sut lui donner du rêve, et fit de ses prestations des moments de spectacle au vrai sens du terme.
L'artiste était, paraît-il, un "sale bonhomme", caractériel, despotique sous couvert de perfectionnisme brandi en outil promotionnel ; c'est vrai, et le document de Karl Zero (un revenant ?) ne fait pas l'impasse sur cet aspect beaucoup moins pailleté de la personnalité du chanteur.
Ce qui est indéniable, c'est que nombre de chansons de l'histrion font encore frétiller les jeunes générations, qu'il a laissé une trace dont on peut se demander quand elle s'effacera, quand, de nos jours, on voit disparaître peu à peu celle d'un Bécaud qu'il considérait comme un maître, et dont les chansons ont, au niveau des textes, une tout autre portée.
Mystère ? Peut-être pas : "ça s'en va et ça revient" ensoleilla sans doute davantage les corons que bien des chansons "à texte".
Pas de bol, c'est au moment où le créateur de Comme d'habitude (on a entendu bien pire, au demeurant) préparait un album avec le grand Roda-Gil que la mort fit son œuvre de la manière que l'on sait. Pour un compliment dans Le Monde, caramba, encore raté !
En cadeau bonus, une perle : un joli "tube" de Claude François revu par Barbara.
Anecdotique et amusant.
2 commentaires:
Quel éclectisme dans ces pages ! Ce n'est pas ma tasse de thé, mais vous avez raison quant au mépris de l'intelligentsia. Il m'arrive d'écouter avec plaisir Dalida, par exemple.
Jules
Et pour faire chanter en chœur les amis lors des soirées de fêtes, il n'y a pas mieux !
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