Le journal quotidien - non hétérophobe - de
Silvano Mangana (nom de plume Louis Arjaillès). Maison de confiance depuis 2007.

"La gravité est le plaisir des sots"
(Alexandre Vialatte)


mardi 15 octobre 2019

Automneries 2019, numéro 4

Voir la musique

Quand j'étais adolescent, l'un de mes voisins, un veuf vénérable d'une soixante d'années, me recevait chez lui pour des séances d'écoutes de disques sur un matériel ultra sophistiqué de très haute fidélité.
Deux fauteuils Voltaire nous accueillaient entre les bras desquels nous écoutions, les yeux clos, les grandes œuvres du répertoire jouées à fort volume : en poussant les décibels, mon hôte semblait vouloir me convaincre de la qualité de la chaîne qu'il avait savamment constituée. C'était le temps où les amplis étaient "à lampe", qui envoyaient leurs signaux à de volumineuses enceintes suffisamment espacées pour que l'on jouisse pleinement de la stéréophonie. Le programme comportait, je m'en souviens, des pièces particulièrement adaptées, du Sacre du printemps à Shéhérazade en passant par la 6e de Tchaïkovski dite Pathétique dirigée par Monteux, et je me souviens que la marque "Living Stereo" constituait l'essentiel de la discothèque de mon audiophile : c'était, affirmait-il, la garantie des meilleures prises de son et de pressages de même niveau.
Ces moments me revenant, je pense inévitablement à l'immense pianiste que fut Sviatoslav Richter qui, de son temps, réunissait un petit cercle de proches pour écouter des disques dans son salon, religieusement, comme on écoute un concert.
C'était à une époque où l'on ne regardait pas la "télé" en guise de veillée.
J'ai déjà écrit dans ces mêmes chroniques d'automne, la première, que ce type de cérémonie se produisait parfois chez moi avec un ami non-musicien qui adore que je lui fasse écouter une oeuvre pour piano en la suivant du doigt sur la partition. Il adore ça, il dit qu'ainsi je lui permets de "voir la musique".


Alexandre le (déjà) grand, de Milan(o) à Pékin




Je me suis inscrit à la "page Facebook" du tout jeune pianiste russe Alexander Malofeev pour lequel, ici-même, j'ai tenté de partager mon engouement. J'avais notamment relaté la formidable ovation qui avait salué son interprétation du Concerto pour piano et orchestre de Grieg en conclusion des folles journées de Nantes. Le gamin (18 ans) parcourt allègrement le monde pour porter le flambeau de la jeune garde du piano. Les mélomanes ont pu l'applaudir lors d'une récente tournée italienne - je l'ai manqué de peu à Bologne -, il a joué avec le même succès à La Roque d'Anthéron cet été, parcourt la Russie de long en large, et on l'attend à Paris au cours de l'hiver.
Dimanche dernier 6 octobre, il était à la Scala de Milan(o) pour jouer le périlleux Concerto n°3 de Rachmaninov sous la baguette du grand Riccardo Chailly avec l'Orchestre du Festival de Lucerne désormais fameux.
Alexandre, le maestro Chailly et l'orchestre ont quitté l'Europe et se produisent actuellement en Chine.
Ils ont fait un triomphe au National Centre for the Performing Arts de Beijing (Pékin) où ils commençaient leur périple dans l'immense pays, où la musique classique est plus qu'appréciée.*

Pékin (Beijing) après "Rachma"

Fin de concerto à la Scala, 8 octobre 2019

Page fb d'Alexander Malofeev : clic


Notre douleur, notre gloire


Antonio et Pedro en couverture de Variety, plus gloire que douleur

Avec tout ça (la rentrée, l'adieu au farniente...), il m'avait échappé que les DVD et Blu-ray de Dolor y Gloria (Douleur et gloire) étaient enfin dans le commerce.
J'insérai ici la scène la plus "caliente" du film la semaine dernière sans me douter que l'on pouvait (enfin !) la voir à loisir à la maison, autour de laquelle, tout de même, un film bouleversant, sans doute le meilleur Almodovar depuis la grande époque de Tout sur ma mère, Parle avec elle, et autres Volver.
Le disque est accompagné de quelques suppléments sur les coulisses du tournage.
Ayant beaucoup apprécié Parasite
Un placement sûr. (C'est chez Pathé)




"Pacifiques" ou "Pacifistes" ?


Le monsieur, là, au milieu, est un pacifiste

C'est une vue (partielle, seulement, hélas !) de l'état des lieux en matière de vocabulaire.
Il a suffi qu'un péquin, lors des premières manifestations du mouvement appelé "des gilets jaunes" proclame "nous, on est des gens pacifistes" pour que tout le monde emboîte le (faux) pas, médias en tête.
Personne n'a rectifié, personne n'a cru bon d'expliquer que le pacifisme est une idée, un mode de pensée, que je peux me déclarer "pacifiste" (un nom commun) si je refuse tout conflit armé, ou "pacifique" (un adjectif) pour signifier que je n'ai pas d'intention belliqueuse.
Ainsi, un adjectif est quasiment rayé du langage avec la complicité des journalistes (vous savez, les "cékoi" et autres "vousenditeskoi" etc. !) et un substantif qui n'avait rien demandé est privé de son sens.

Ici tout est pacifique.
Même l'océan.
* Alexander Malofeev donnera un récital à Paris, le mardi 19 novembre Salle Gaveau.
J'y reviens prochainement.

6 commentaires:

Xersex a dit…

À propos de HI FI, mais croyez-vous vraiment que la poésie ne peut pas aller au-delà d’un son de fidélité moins élevé?

Silvano a dit…

Xersex : bien sûr que si. Mais je pense que vous n'avez pas compris le fond de mon texte.

Xersex a dit…

J'ai compris: il y avait des cénacles pour écouter de la musique, exactement comme je le fais: à travers des disques.

Arthur P. a dit…

Moi, j'écoute avec un phonographe à manivelle.

Unknown a dit…

Je suis étonné que vous ne mentionnez pas que À M sera le 18/11 à Gaveau.
Jean-Paul

Silvano a dit…

Jean-Paul : je comptais faire un billet particulier. Mais vous avez raison, je fais une note en renvoi.