Le journal quotidien - non hétérophobe - de
Silvano Mangana (nom de plume Louis Arjaillès). Maison de confiance depuis 2007.

"La gravité est le plaisir des sots"
(Alexandre Vialatte)


vendredi 8 juin 2018

Cadeau : le génial Jean-Philippe !




Véronique Gens et Les Talens Lyriques, direction Christophe Rousset :
Tristes apprêts, pâles flambeaux de l'opéra Castor et Pollux de Jean-Philippe Rameau (1683-1764), livret de Pierre-Joseph Bernard (1708-1775)

(Télaïre pleure la mort de Castor. Acte I, Scène 3)

Tristes apprêts, pâles flambeaux,
Jour plus affreux que les ténèbres
Astres lugubres des tombeaux,
Non, je ne verrai plus que vos clartés funèbres.
Toi, qui vois mon cœur éperdu,
Père du jour, ô soleil, ô mon père!
Je ne veux plus d'un bien que Castor a perdu,
Et je renonce à ta lumière.

3 commentaires:

Pippo a dit…

Quel beau cadeau, merci Silvano. L'Air de Télaïre est un de mes favoris.
A son sujet, Rameau a écrit quelques lignes qui témoignent de sa perspicacité : "Ne se sent-on pas naturellement frappé de componction avec l'Actrice qui chante Tristes apprêts [...], au moment de la quinte au-dessous, savoir fa qui succède à ut sur la dernière syllabe ? et ne se sent-on pas un peu soulagé quand l'ut revient immédiatement après sur la dernière syllabe de ces autres mots, pâles flambeaux, sans néanmoins qu'il ne reste en nous quelques vestiges de la première impression [...]. Qu'on substitue sol à fa, l'on en sentira bientôt la différence ; l'âme y restera pour lors dans sa même assiette, rien ne la remuera, tout lui deviendra indifférent tant que le même ton subsistera."
Cité par Claude Lévi-Strauss, Regarder écouter lire, 1993, qui se réfère aussi à Berlioz, également sensible à ce "mouvement plagal". L'essai de Lévi-Strauss est partiellement lisible grâce à Google Livres.

Alex H a dit…

Je ne suis pas aussi savant que Mamy Grand et ne saurais analyser. Mais je ressens ce chant de tout mon cœur.

Pippo a dit…

Le sçavant, c'est Monsieur Rameau lui-même. Dommage que Jean-Sébastien Bach n'ait pas laissé de telles analyses, qui allient intelligence et sensibilité, de ses propres œuvres. Certains prétendront que les "vrais" musiciens n'ont pas besoin de telles dissertations, mais je ne partage pas cet anti-intellectualisme, qui souvent n'est qu'un cache-misère. Bien entendu, un interprète peut exceller, un auditeur peut apprécier sans passer par la dissection, comme en témoigne le propos d'Alex.