... un amour qui jamais ne se fit. |
Un ami proche, âgé de 33 ans, fut atteint récemment par le coronavirus. Au nombre des maux qu'il eut à subir, il perdit, comme beaucoup, la perte du goût et de l'odorat. De temps à autre, sporadiquement, et le plus souvent le matin au réveil, la déficience de ces deux sens est en résurgence. On ne sait dans combien de temps il en retrouvera l'usage complet.
L'olfactif est une partie très précieuse de la mémoire.
Ainsi, l'autre après-midi, je suivis malgré moi le sillage d'un parfum qui réveillait un souvenir enfoui.
C'était Vétiver de Carven qui me ramenait à mes dix-sept ans, dont les effluves imprégnaient l'épiderme du plus beau garçon du monde auquel je vouais un amour qui jamais ne se fit. J'étais bien trop malhabile à l'époque pour lui confier le désir que j'avais de lui. Mes sentiments et l'attirance physique que j'éprouvais étaient peut-être partagés et peut-être, aussi, ce qui me mettait en feu. Je ne le saurai jamais.
L'autre jour, les senteurs de vétiver ont fait resurgir R. au point qu'au tournant de ma rue je m'attendais à le retrouver tel qu'il fut à l'âge des premières amours : sa blondeur alsacienne, la peau d'un visage en pleine santé, son corps de taille moyenne, bien proportionné, sa motocyclette japonaise qui nous menait sur les routes de l'arrière-pays niçois, ses larmes qui jaillissaient de la vitesse combinée aux vents printaniers dont j'eusse voulu m'abreuver ; et moi intimement soudé à lui sur la machine, les bras arrimés autour de sa taille.
Et ce parfum, le sien, qui me fait chavirer aujourd'hui encore.
4 commentaires:
¡Qué bello texto!
On dirait été 85 !
Raymond : je n'ai pas raconté cette histoire vécue à François Ozon, pourtant !
Je ne connaissais pas R. sur la moto japonaise, je pensais à D.
Merci pour ce récit....
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