Rome, février 2012 - Silvano |
La table voisine.
Il doit avoir vingt-deux ans, pas plus.
Et pourtant, j'en suis sûr, il y a presque le même nombre d'années, oui, j'ai possédé ce corps-là.
Il ne s'agit nullement d'une exaspération du désir. Je viens, du reste, à peine d'entrer dans le casino ; je n'ai pas eu non plus le temps de beaucoup boire. Ce corps-là, moi, je l'ai connu.
Et que je ne me rappelle pas où – cela n'y change rien. Ah, voilà, maintenant qu'il s'est assis à la table voisine, je reconnais ses moindres gestes – et sous les vêtements,
je revois nus les membres bien-aimés.
Constantin Cavafis
J'avais pris cette photo depuis le Caffè Canova, là où se rencontraient autrefois Pier Paolo Pasolini, Alberto Moravia, et Federico Fellini, entre autres inoubliables figures.
Sous l'image, j'avais écrit le texte suivant :
Assis au Canova, je sursautai, à la grande surprise de mes convives.
Je leur dis que je photographiais la place, fort animée en ce mardi gras, mais c'est lui que j'immortalisai.
Ce n'était pas possible, ce ne pouvait être lui, surgi de mon passé ?
Et pourtant, mon appareil-photo moderne, numérique — par quel philtre
sorcier ?- me le restitua ainsi, telle une vieille photo d'autrefois,
issue d'un vieux Leica ou d'un Rolleiflex antédiluvien.
Élégant ragazzo, tu ne sauras jamais à quel point tu lui ressembles.
* Le garçon de la "Piazza di Popolo"
1 commentaire:
C'est très cavafyien en effet, dans le ryhtme et le choix des mots (ce "philtre sorcier" dont vous ne dites pas s'il fut prépáré "selon les antiques formules de mages gréco-syriens") et le thème général.
Seb
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