Le journal quotidien - non hétérophobe - de
Silvano Mangana (nom de plume Louis Arjaillès). Maison de confiance depuis 2007.

"La gravité est le plaisir des sots"
(Alexandre Vialatte)


dimanche 3 avril 2016

'Quand on a 17 ans', un film de jeune homme

André Téchiné a 73 ans. En fait, pour paraphraser Jérôme Garcin (dernière livraison de l'Obs), André Téchiné a dix-sept ans. Peut-être, l'ayant observée tout au long de sa vie, avec la considération qu'elle mérite, sans jamais oublier la sienne, le cinéaste des Innocents, du Lieu du crime, des Témoins, sait-il mieux que quiconque dans le cinéma français, donner à voir la jeunesse dans ce qu'elle a d'authentique, de sauvage (!), avec ses maladresses de débutants de vie, sa violence, la confusion de ses sentiments, ses premières ivresses, le désir, enfin, dont l'éveil est l'un des évènements majeurs de l'existence.
C'est pour cette raison, c'est incontestable, que Quand on a 17 ans, dont on connaît peu ou prou la trame par la grâce (?) de l'indispensable "promo", est sans aucun doute une œuvre dont la première vertu est la sincérité.
Il faut bien dire qu'outre les qualités du metteur en scène, le film doit cette évidence au talent de ses interprètes, Sandrine Kiberlain, qui avance dans sa carrière avec intelligence (car il y a des actrices "intelligentes") et de ses deux jeunes, Kacey Mottet Klein (Damien) et Corentin Fila (Tom), en état de grâce, comme le furent, avant eux, Gaël Morel et Stéphane Rideau dans Les roseaux sauvages. Ils en sont les héritiers modernes, et peuvent remercier leur réalisateur qui est indéniablement un grand directeur d'acteurs, comme le cinéma français en compte de moins en moins.
Il faut un sacré talent au cinéaste et à ses jeunes acteurs, pour faire d'une scène de sexe la plus belle des scènes d'amour qu'on ait vue depuis longtemps sur un écran.
Kacey Mottet Klein, Corentin Fila et Sandrine Kiberlain
J'en dis déjà beaucoup, la "promo" dont je parlais plus haut, s'étant chargée d'en dévoiler un peu trop déjà : il faut aller voir Quand on 17 ans en oubliant ce que l'on en sait, et se laisser happer par le climat exceptionnel dans lequel baigne cette belle histoire (co-écrite avec une Céline Sciamma de grand talent), dans les superbes paysages pyrénéens magnifiés par la photo de Julien Hirsch.
Si la relation entre les deux garçons irradie le film de bout en bout, il faut retenir aussi le personnage de Marianne, incarnée par Sandrine Kiberlain : c'est une mère dont beaucoup peuvent rêver, confrontée à un drame, mais aussi à la découverte de la différence de son fils.
- Tu ne dis rien, maman !?
Non, elle sait qu'elle n'a rien à dire...
Non, elle sait qu'il n'y a rien à dire, qu'elle ne peut rien dire, qu'elle ne doit rien dire : elle ne sait qu'une chose, c'est qu'elle aime son Damien.
Elle sait aussi que Tom est beau. Elle comprend.
Enfin, il faut souligner à quel point ce film est un remède qu'il faudrait administrer à la partie la plus homophobe de la jeunesse, de cette génération qui, je le constatai amèrement hier, est loin de constituer la majeure partie du (nombreux, c'est déjà ça !) public de la salle obscure où j'ai vécu un grand moment de cinéma, instants rares volés à l'âpreté de l'époque.
Pour ça, merci à André Téchiné et à sa "famille" d'un film.
Silvano Mangana  





3 commentaires:

Silvano a dit…

Supprimé un commentaire qui en révélait trop sur le déroulement du film.

Jean-Yves Alt a dit…

Je partage vos mots sur ce film.

Alex H a dit…

A mon programme cette semaine.