SPQR
Étrange mois de février encore balbutiant, où les vacances scolaires ont fait le vide dans le quartier : il faut dire que ma rue est bordée d'un lycée professionnel, d'une école élémentaire, et d'une maternelle, tout ceci favorisant, en temps ordinaires, une joyeuse - ou vociférante, dans l'un des cas - animation qui justifie les double-vitrages du salon-bureau-salle à manger où je passe le plus clair (j'habite en hauteur) de mon temps quand je ne suis pas dans mes locaux professionnels.
C'est ouaté comme s'il avait neigé, comme dans les anciens mois de février où il neigeait, avant que tout ne se réchauffe, et plus vite que prévu, comme on peut le constater.
Mon dernier séjour à Rome - vous savez, la ville où tous les Parisiens rêvent d'habiter ! - m'a laissé en mémoire des trottoirs verglacés, et une neige devenue bouillasse ; un Paris d'après flocons, quoi.
Cette année, il y fera beau et presque chaud, selon la météo : une tenue tee-shirt-chemise-veste suffira dans la journée pour battre le pavé, à laquelle j'ajouterai un pull léger de bonne confection pour les soirées grappa dans mes ombres rousses d'observation (les initiés sauront) où l'on a inscrit à la carte une salade "Pasolini".
C'est cette semaine.
La dernière fois, pérégrinant, j'avisai un hôtel dans le Trastevere où, sans mettre à jour mes intentions, j'ai envoyé des amis aoûtiens en repérages l'été dernier : bien m'en a pris, le test s'avérant plus que positif. Les tarifs n'ayant rien à voir avec ceux pratiqués en pleine saison, je flaire la bonne affaire.
Pas de programme établi, puisque Rome n'a plus aucun secret pour moi. Je plaisante, bien sûr : qui peut le prétendre, même après cent séjours ?
Peut-être finirai-je par voir un pape, cette fois ?
Ce Julien Green, quel gros pédé !
J'ai commencé la lecture du pavé (1376 pages pour ce premier tome !) : le
Journal intégral de Julien Green, que la commère Peyrefitte (Roger, pas Alain, le ministre abhorré de De Gaulle) avait "outé", comme on dit au jour d'aujourd'hui (parce qu'on dit aussi "au jour d'aujourd'hui, si !).
C'est très intéressant : on apprend plein de choses sur les contemporains de l'écrivain franco-américain, qui fréquenta tous les gens de lettre du siècle dernier, étant donnée sa notoriété qui n'était pas des moindres, son entregent et, le journal étant de ceux que l'on dit intimes, son entrejambes, lequel ne chôma guère, à une époque où l'on draguait dans les bus, en faisant du lèche-vitrines avant de passer à d'autres plaisirs des papilles... bref, bien avant qu'on programme ses coups ou ses amours par l'entremise des "applis" pour smartphones, c'étaient des pérégrinations dans Paris que l'écrivain appelait à juste titre "aventures", car cette quête, effrénée en ce qui le concernait, relevait de la chasse aux trésors ; et quel trésors leva-t-il si l'on en croit !
Je suis pour l'heure au cœur de ses années 30, où l'auteur confie à ce confessionnal (il était hyper-catho !) tous les plaisirs auxquels il s'adonnait, et ce avec force détails, au point que j'en suffoque, moi qui eus tant de scrupules quand je couchai (!) sur le papier virtuel les scènes érotiques de mon roman : mais de nos jours, où le pilori est de retour, on peut imaginer Green tenant blog et se retrouvant à la merci de la vindicte populaire, et enfin lynché à mort sous les vivats de la foule déchaînée.
Ce journal, outre qu'il est bien écrit, est suffisamment bandant pour faire couler beaucoup de sperme, mais dans le secret des chambres d'ados qui s'aventureraient - tiens, encore et heureusement l'aventure ! - à le lire sous la couette à la lueur de la torche de leur smartphone, comme nous le fîmes des
Amitiés particulières, lesquelles étaient beaucoup moins évocatrices, un simple baiser sur la bouche suffisant à faire naître, entre les draps, ce que je nommerai pudiquement... des flots d'exaltation !
C'est bien rigolo, et, de page en page, entre deux rencontres avec Gide, Cocteau, et autres éminents pédés de l'époque, on est pris à témoins de joutes agréables avec des jeunes gens peu farouches, ce qui permet de mesurer à quel point notre époque, si elle a ses avantages, est tout de même celle d'un gigantesque pas en arrière en matière de mœurs, qui "permet" des avancées sociétales de mes deux, genre "ouais, c'est cool, now on peut se marier" juste avant de se faire casser la gueule au coin de la rue parce qu'on a tenu un mec par la main.
Bref, vu qu'il n'est pas l'oeuvre du premier écrivaillon venu, et que ça nous révèle beaucoup de choses sur le temps passé et, finalement, le temps présent, ce bouquin dont je viens d'entreprendre l'escalade par la face nord, me semble indispensable à tout vieux nostalgique et, surtout, à tout jeune mec doté d'une qualité essentielle : la curiosité.
Une vision trop fugitive
J'ai souvent dénoncé ici la négligence vestimentaire qui fait l'ordinaire - c'est le cas de l'écrire - de nos concitoyens, jeunes et moins jeunes. J'avais relevé l'extrême élégance des Milanais de tous âges lors de mon dernier séjour dans la cité des Sforza (ou du risotto, c'est selon).
J'y notai que, même si l'on y croisait des modèles professionnels vêtus haute-couture, le quidam mettait un soin particulier à sa mise, sans pour cela se ruiner en marques de luxe (quoique...), mais qu'une tenue en prêt-à-porter choisie avec goût indiquait un respect de soi et des autres qui le distinguait du touriste de base, français notamment.
Arpentant l'autre après-midi la rue commerçante de mon quartier, j'avisai un jeune mec de seize ou dix-sept ans y cheminant au bras d'une jolie maman, un garçon pas plus beau qu'un autre, peut-être, mais vêtu de telle façon que j'en restai interdit : habillé "jeune", certes, mais avec recherche, et coiffé d'un feutre d'un coloris parfaitement assorti à sa tenue du moment.
Ça ne laisse pas de surprendre en ces temps uniformes, d'autant que, personnellement, je n'ai pas "une tête à chapeau" comme on dit.
Pour cette allure qui le sublimait, j'eus envie de dire merci à ce garçon.
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De la tête aux pieds, tant qu'à faire. |
Vie violente
Sur l'affaire Griveaux, pour lequel je n'avais nulle intention de voter, au demeurant, c'est, en quelques mots,
Raphaël Glucksmann qui, dans fesses book, traduit le mieux ma pensée.
Je le cite donc : "
Peu importe ce qu’on pense de Benjamin Griveaux, cette histoire est profondément dégueulasse, et inquiétante pour la suite. On s’en fiche de la vie sexuelle (totalement légale) de nos adversaires, on doit combattre sur le terrain des idées et des projets.
La politique, cela ne doit pas, cela ne peut pas être ça. Ressaisissons-nous collectivement ou nous allons tous nous noyer dans la fange. "
Si vous commentez*, merci de citer le paragraphe de référence.
Détendons-nous un peu, après tout ça, avec ce long jeune homme nommé Joland Novaj.
* Je m'efforcerai de publier les commentaires pendant mon court séjour romain, mais ne vous impatientez pas si j'ai quelque retard.